Iryna Jaskevich est la présidente et dirigeante intrépide de VMESTE (mot qui peut se traduire par « ensemble »), un syndicat biélorusse représentant les vendeurs indépendants des marchés et des rues. Lors du dernier congrès de StreetNet, elle a été élue membre du Conseil international.

Iryna vit et se bat en Biélorussie, un pays dont la situation politique n'est pas facile pour les militants des droits de l'homme et des travailleurs. Le président autoritaire dirige le pays depuis 1994 a récemment apporté des amendements à la Constitution afin de prolonger son mandat, potentiellement, jusqu'en 2035. Les syndicalistes comme Iryna et ses camarades n’ont cependant pas abandonné la lutte.

S'impliquer dans le mouvement ouvrier

Iryna est née dans une petite ville de la région de Minsk et, enfant, elle a déménagé dans un village à la campagne, lorsque son père est allé travailler dans une ferme collective (kolkhoze, En grandissant, Iryna a commencé à travailler comme chef de production et à mener une vie assez confortable. Tout a changé après l’effondrement de l’Union soviétique : elle s’est retrouvée au chômage et, pour survivre, elle a commencé à vendre des marchandises dans la rue. « J’avais très honte de moi », a déclaré Iryna. « Je devais dormir dans un lit mobile. La vie était assez dure. » Au bout d’un an, elle est devenue présidente du conseil du marché où elle travaillait. « Nous avons commencé à exiger de meilleures conditions de travail et à négocier directement avec le conseil municipal. »

À l’époque, la situation des licences et des inscriptions sur le marché était assez floue : les législations étaient contradictoires et cela causait beaucoup de confusion parmi les travailleurs. « Nous avons commencé à protester pour que la loi soit plus claire. Nous nous sommes unis à d’autres marchés et avons formé un conseil collectif. C’est à ce moment-là que notre syndicat a commencé à être actif. »

Le pouvoir d'influence du syndicat a augmenté, à tel point qu'au début des années 2000, ses membres ont été admis aux négociations avec les autorités nationales à Minsk. Un petit groupe de participants a même été admis en présence du cercle proche du président. Iryna était parmi eux. « Il n’est pas si courant que des femmes dirigent des organisations syndicales » dit-elle. "Même si la majorité des vendeurs de rue sont des femmes, souvent en situation de vulnérabilité et responsables de leur famille, la plus grande partie des dirigeants sont encore des hommes.

Rejoindre StreetNet

La situation politique actuelle et le tournant autoritaire ne permettent pas aux syndicats d'avoir autant d'influence que par le passé« Il n’existe pas de liberté de réunion de fait. Si plus de trois personnes se rassemblent, cela est considéré comme une manifestation : j’ai déjà été averti deux fois. » Un obstacle majeur au travail et à l’activisme politique du VMESTE est que le syndicat a été s'est vu refuser un enregistrement officiel par les autorités. Iryna et ses camarades ont protesté à plusieurs reprises contre ce refus. Leur adhésion a également été refusée par la fédération officielle des syndicats du pays.

« En 2010, nous avons reçu une invitation à rejoindre Street Net. Nous avons d’abord décliné, pensant qu’il n’y avait aucune possibilité d’adhérer, en raison de notre absence d’enregistrement officiel. Mais StreetNet a accepté notre participation : cela a vraiment été une bouffée d’air frais. Nous avons trouvé dans StreetNet la chance de faire partie d’un réseau de solidarité transnational et l’opportunité de faire entendre notre voix et nos problèmes au niveau international. »

Un leader intrépide qui donne du pouvoir à la prochaine génération

Actuellement, VMESTE fonctionne officiellement comme un prestataire de services pour les vendeurs indépendants, offrant des conseils et une assistance dans les démarches juridiques et administratives. Leurs réunions sont souvent encadrées comme des formations, comme le travail politique ne peut plus être mené à découvert. Malgré les difficultés, VMESTE continue d’investir dans de nouvelles énergies pour son organisation. « Nous offrons des formations aux jeunes travailleurs sur la façon de répondre aux plaintes des autorités et de se défendre. Nous accueillons toujours les jeunes dans notre organisation. »

Iryna prend des risques personnels pour poursuivre le travail du VMESTE dans le climat politique actuel. « Quand je suis dans le train en direction de chez moi, je me demande parfois si je vais vraiment rentrer chez moi ou si je vais être arrêtée et emmenée ailleurs. Mais je n'ai pas peur d'être exposée. Nous continuerons à soutenir nos membres et leurs familles, du mieux que nous pouvons, aussi longtemps que nous le pourrons. »