Les autorités de Kinshasa ont lancé une opération de répression contre les vendeurs ambulants qui vendent leurs marchandises le long des avenues de la capitale. Présentée comme une opération « pédagogique », la police a fini par détruire et brûler des étals mercredi matin. L'un de nos Observateurs les a filmés en pleine action.
Lancée le 11 décembre, cette opération s'inscrit dans le cadre d'un plan de nettoyage de la ville visant à rendre la capitale plus attractive. L'objectif est de faire disparaître tous les marchés de rue où se sont installés des vendeurs sans licence. Les autorités ont annoncé qu'elles envisageaient de remplacer ces marchés par des espaces verts.
Selon Radio Okapi, un jour avant le début de l'opération, le chef de la police locale avait annoncé que « les vendeurs ambulants et les garagistes sans licence seront priés de conduire leurs véhicules et leurs marchandises dans les endroits réservés [à ces activités] ».
« Je ne pense pas que les autorités municipales puissent prétendre qu'elles « nettoient la ville » en utilisant des méthodes qui ne sont pas propres »
Mercredi matin, John Kilunga (nom d'emprunt) marchait sur une avenue très fréquentée du centre-ville de Kinshasa, à proximité du campus de l'Université de Communication de Kinshasa. De nombreux vendeurs ambulants proposaient des fournitures destinées aux étudiants de l'université.
« J'ai entendu des cris et j'ai vu un énorme incendie se déclarer dans la rue. En m'approchant, j'ai vu plusieurs policiers renverser des étals et déchirer des sacs de farine, de riz et d'autres produits alimentaires. D'autres piétinaient les marchandises des marchands. Une femme âgée s'accrochait à une table en bois pour les empêcher de la jeter au feu, tandis qu'un policier la poussait violemment.
Le général Kanyama, chef de la police du district, était présent [plusieurs journaux locaux ont confirmé sa présence lors de l'opération]. Les policiers ont même pris des caisses de sardines et les ont mises dans un de leurs véhicules.
Je connais bien certains de ces vendeurs. Ils m'ont dit qu'ils avaient déjà été harcelés par des employés municipaux qui leur demandaient des pots-de-vin pour pouvoir continuer à vendre leurs marchandises. Impossible de savoir s'il s'agissait réellement d'employés municipaux, mais en tout cas, les vendeurs étaient tolérés : certains d'entre eux travaillaient ainsi depuis une décennie sans rencontrer le moindre problème !
Je ne pense pas que les autorités municipales puissent prétendre qu'elles « nettoient la ville » en utilisant des méthodes qui ne sont pas propres. Cette violence ne sert à rien, car les vendeurs reviennent plus tard. Je suis sûr qu'il doit y avoir de meilleures façons de régler ce problème. »
Contacté par FRANCE 24, le porte-parole de la police de Kinshasa, le colonel Pierrot Rombaut Mwanamputu, a confirmé que l'objectif de l'opération était de "donner de bonnes habitudes aux marchands ambulants en les invitant à libérer les bords de route". Il a toutefois précisé que les policiers "n'avaient pas le mandat de détruire des marchandises". Il a indiqué à FRANCE 24 qu'il n'avait pas entendu parler de destruction de marchandises par les policiers mercredi et qu'il montrerait la vidéo au chef de la police de Kinshasa qui déciderait alors d'ouvrir ou non une enquête.
Depuis 2010, les autorités de la ville ont mené plusieurs opérations de répression dans les marchés de rue de Kinshasa, qui ont tendance à prendre de l'ampleur à l'approche des fêtes. A l'époque, les journalistes locaux avaient déjà dénoncé les méthodes violentes employées par la police.
Article rédigé avec la collaboration du journaliste de FRANCE 24 Alexandre Capron (@alexcapron).
Des vidéos de cette histoire peuvent être visionnées sur ce lien – http://observers.france24.com/content/20131220-police-street-merchants-congo-vendors
Article provenant de www.observers.france24.com